A comme Absence

J'ai fini par m'y faire doucement.
Me réveiller sans pleurer, accepter la cage vide.
M'habiller tout en noir au moment de l'enterrement.
Verser encore une ou deux larmes.
Jeter la petite maison rouge sous la terre.

Lio qui m'emmène dans une animalerie.
Mais rien n'y fait, ça vaut pas Lundi.

Et puis ces putains d'habitudes.
Ne pas finir sa pomme et se dire "j'filerai la fin à Lundi".
Ah oui non, elle est morte.

Lio qui dessine un projet de cage qu'il veut construire, me le montre, et moi de lui répondre "Oh, ça sera pour Lundi ?!"
Lui qui me regarde étrangement.
Ah oui non, elle est morte.

J'ai révé d'elle chaque nuit.
J'ai pensé à elle.
Beaucoup.

Tu vois, dans ma tête, elle est pas vraiment morte.

B comme Braderie de Lille

Obscurité.
Stand d'objets à vendre.
La foule.
Lio.
Ryne.
Fred et Kournikova.

Comment je me suis retrouvée à vouloir me prostituer pour avoir une bouteille d'Heinekein géante en plastique.
Comment le mec du stand m'a fait attendre une heure avant de bien vouloir me l'offrir.
Pour la casser le lendemain.
Sur la tête de Lio.
Suite à une discussion politique.
Naze.

Comment un homme s'est mis debout sur la table pour se déshabiller sous nos aplaudissements de foule en délire.
Malheureusement, il était pas terrible.

Comment un autre homme, sorti de derrière une voiture, m'a gentillement informé qu'il n'avait pas seulement uriner.
Et comment ça m'a choqué.

Comment j'ai fini bourré à vouloir caser Ryne avec le premier clochard venu, à sympatiser avec tous ceux qui comme moi font pipi derrière les voitures (et seulement pipi).

C comme Commnuniste

Y'a toujours quelque chose qui déconne chez un mec.
Le mien à commencé à déconner le soir où il m'a dit "je suis plus de droite que de gauche".

Optimiste, comme s'il s'agissait d'une vilaine petite poussière coincée dans l'oeil, je ne me suis pas enflammée.

Mais, tu m'connais.

Un soir j'ai pleuré, un soir il a pris tous mes rêves d'humanité et les a lapider devant moi, je suis partie, j'ai renoncé, à travers cette ville que je ne connais pas, j'ai marché dans l'espoir de trouver un métro, un bus, un moyen de partir, et puis abandonnant l'idée de retourner à Paris, j'ai su trouver la maison de Ryne, m'y blottir quelques heures, me faire reconforter, respirer.

Je sais que j'écouterai toujours du Renaud à m'en crever les tympans.
Je ne sais pas comment je vais faire pour lui enlever cette poussière d'égoisme coincée dans l'oeil.

D comme Duperie

J'ai pour habitude de fouiller.
La curiosité est un vilain défaut.
Je le sais, car c'est toujours comme ça que l'on tombe sur des vérités qu'il aurait été bon d'ignorer.

Je lisais les textos de Lio.
Quelle ne fût pas ma surprise de tomber sur un avalanche de texto de l'ex numéro 2.
Et pas des textos de merde, s'il vous plait.

Mais des "Ca te dirait de venir chez moi demain matin ? On pourrait faire la grasse matinée ensemble !"
Allez pas me faire croire qu'elle avait l'intention de manger des croissants en lui parlant de sa grand-mère.

Et puis des "J'arrête pas de penser à toi, c'est bète que t'aies une copine, tu veux pas qu'on se voit ?"

La connasse.
Le pire c'est qu'elle a commencé à lui envoyer ces textos le soir-même de mon départ pour Paris.
C'est vraiment faire sa connasse.

E comme Entrevue

Sous les conseils de Ryne, nous sommes allée la voir.
Règlement de compte, tout déballer, l'écouter se défendre et lui gueuler dessus un bon coup.
Histoire de se soulager.

Métro.

Elle arrive, toute fringuée n'importe comment, grand sourire, loin de se douter.

"Oh Ryne elles sont belles tes atébas !
- Ouai ouai, bon on va dans un bar ?"

Mon coeur s'affolait.
Des silences.
Par quel mot commencer ?
On repeind les murs avec son sang ou on discute un peu avant ?

Elle fait l'innoncente, elle nie, elle se débat, comme un poisson pris dans un filet qui croit encore qu'il peut s'en sortir vivant.

Je sors le portable de Lio, lui montre les preuves.
Elle tremble, elle fume ses clopes, elle n'ose pas les regards.
Elle me dit qu'elle n'est pas coupable, que c'est d'la faute de Lio aussi.
Mais elle se défend comme une criminelle.

On se radoucit.
On l'a bien liquider.
On va peut-être commencer à être gentille.
Après tout, c'est qu'une victime.
Après tout, elle est vraiment pas méchante.

Elle tremble et ça me met mal à l'aise.
J'ai cru qu'elle allait pleurer.
J'ai cru qu'elle allait partir, la tête entre ses mains.

Mais non, victime, elle n'a pas bougé, elle n'a rien dit, elle s'est laissé faire, elle nous a fait la bise, elle nous a dit merci.

Et elle a payé l'addition.

F comme Famille

Comme si tout avait l'air de s'arranger.

Mon frère m'a appelé.
Depuis qu'il sait pour mon grand-père, il s'inquiète, prend de mes nouvelles.
Et ça me fait sourire.
Cette demi-heure passée au tel avec lui, à l'écouter me raconter ses conneries.
M'appelle Chister et me fait un bisou.
Mon franjin d'amour.

Mon grand-père qui commence a marcher doucement, lentement, comme une renaissance.
La peur qui s'évapore.

Mon père qui a réussi à garder le même boulot pendant un mois.
Qui gagne le double de son habituel SMIC.
La joie que ça a coller dans mon coeur.
Comme si.
Tu vois, c'est pas si dur de s'en sortir.

Et ma mère, discrète, qui m'écrit pour me dire qu'elle s'est acheté un nouveau canapé.

Si tout le monde va bien, que demander de plus ?

G comme Grandes vacances

La nationale.

Banquette arrière.
Corps enfouit dans la couverture.
J'ai plongé ma tête dans les étoiles.

J'y ai vu de la nostalgie, j'y ai vu le Sud et la montagne au mois de février.
J'ai fermé les yeux.
Musique douce.

Ne pas savoir ce qui nous attend, mais savoir que ça sera beau.

H comme Horrible autostopeur

Il est monté à côté de moi vers 3h du matin, prenant la moitié de mon espace vital.

En 2 minutes il avait déjà dit

- T'aurais pas une clope ?
- Tu peux pas mettre un peu de musique ?
- T'as pas un truc à boire ?
- Y'a que ça ?
- T'aurais pas une autre clope ?

Je me marrais doucement sous ma couverture.
"Demmerdez-vous les mecs, moi je dors".

On a roulé silencieusement jusqu'à Lyon.
Quand il est parti nous avons explosé de rire.
"Mais quel con ce mec, putain, pas chier franchement, un peu plus et j'y gueulais dessus !"

Devant nous, un fleuve.
"C'est chouette Lyon, j'aimerais bien y vivre, ça donne vraiment envie".
Reflèt des lumières dans l'eau.

Lio est blanc comme un linge.
Ca fait que 14h qu'il conduit.
Nikos propose de prendre le volant à sa place.
Le problème, c'est que Nikos n'a pas le permis.

Je regarde la tête de Lio.
Je regarde Nikos.
"Franchement, si on te laisse conduire encore 4h, j'ai peur pour nos vies.
J'préfère que ça soit Nikos".

Le chauffeur ne se laisse pas détroner si facilement, mais finit par ceder.
Douce odeur d'une nuit d'été.

Je m'endors.

I comme Invités

7h.

Réveil difficile, on est arrivé.
Nikos nous amène dans "sa maison".
Me gueule dessus parce que j'écoute mon Nano pour me réveiller.

"Antisociale tu perds le contrôle".
Gnagnagna.

On rentre.
Tête de zombis.

Face à nous, pleins de gamins.
Ahoutch.

18 personnes.
18 personnes à qui il va falloir faire la bise.
18 personnes qui viennent de se lever et qui pète la forme.

Ah, c'est ça, ta maison du bonheur ?

Je m'endors sur la table, entre une boite de Corflakes et une tasse de café.

- Sinon, vous pouvez aller faire une sieste sur le canapé.

Et l'on s'endort sur le canapé géant (forcément, c'est un canapé 18 personnes).

Autant de gens qui vivent ensemble dans une maison, ça donne à peu près ça :

- 1 machine a laver tous les jours
- 1 lave-vaiselle par repas
- 1 facture d'éléctricité et d'eau impressionnante
- 1 organisation bien travaillée
- 3 voitures pour aller faire les courses

Une colo au quotidien.

J comme Journée ensoleillée

On a fini par planter notre tente dans leur jardin.
C'était bonne ambiance et soleil au quotidien.

Je pourrais vous dire que le paradis est accessible en Honda Civic, que de là haut on y a vu les montagnes à perte de vue, du ciel bleu et le vide à nos pieds, je pourrais vous raconter les ricochets dans l'air, la guitare et le djumbé qui résonnaient sous les pieds, le vent, les odeurs, le coucher de soleil sur l'horizon, le concours de blagues en marchant, l'appareil photo de la mère, les animaux, la tête qui tourne, les yeux vert-bleu ravis, la chaleur dans le coeur.

Ou bien la cascade, l'arc en ciel sur le lac, la rivière descendue de rocher en rocher, la sueur sur nos fronts, mes jambes courbaturée, ou bien les balades en voiture, fenêtre grande ouverte, mes "j'ai froid" qui faisaient chier tout le monde, les klaxons sous les tunnels, Tryo dans l'autoradio, les photos trop clairs à cause de soleil, les flics parce que Nikos était debout dans la voiture, le premier soir avec du wisky dans le noir, pipi dans la rivière et racontage de vie sexuelle, et la charmante image qu'ils se sont faite de moi.

Mais aussi le blondinet, celui qui avait la tchatche et qui trouvait que j'étais "une fille cool qui se prend pas la tête (parce que j'ai fait un plan à trois), la fille qui m'a traité de salope (parce que j'ai fait un plan à trois), la salle de bain, le petit Polux endormi sur le canapé, Dimar qui m'a montré son zizi et le traumatisme que ça a engendré pour mon esprit (E-NOR-ME), la promenade tous ensemble un après-midi, les enfants regardant les poissons, et puis bien sûr, la bière aux marrons.

J'pourrais vous raconter tout ça mais ça semble un peu long.
Une semaine en Ardèche.
Et pas une seule piqure de moustique.

K comme Kriek

J'aime noté toutes les différences entre Lille et Paris.
Toutes ces petits détails que j'oublierai vite.

- Les métros, beaucoup plus petits
- L'absence de noctilien
- La casi-absence de taxi

- Les "s'il vous plait" pour dire merci (influence Belge ma foi)
- L'accent Lillois et leurs expressions (Alleeez ! C'est qui drache fort !)

- Le prix du pack de bière
- Le nombre affolant de bières différentes (mhhhhh)
- Les fritteries partout (influence Belge ma foi)
- Le nombre affolant de sauce différentes pour les frittes (mhhhhh)
- Le filet américain
- Les chiens dans toutes les maisons

J'aime cette ville, elle me plait, parce qu'elle est moins riche, parce que les maisons sont moins hautes dans le ciel, parce que tout est vierge et que ça fait du bien aux yeux.

L comme Loin du coeur

Et c'est quand ils ne sont pas là que je me rends compte à quel point il me manque.

Mes amis.

Alors j'ai engueulé sur Lio pour qu'il roule plus vite.

Fête de l'huma.

Noémie qui nous attend devant.
Noémie qui est triste parce que Renaud l'a quitté.
Enervée aussi.

Le rendez-vous sous le stand PCF Villejuif.
En dessus le 3eme M de Communiste.

Et ma joie.
Reno, Poopook, Matthieu, Ariane.
Joie de le revoir.

Il y a eu tous les concerts ratés, les pogos sur Iggy Pop, le concert de Renaud qui m'a beaucoup ému.

Il y a eu l'alcool, bière à 2€, stand de partout, beaucoup de monde, trop de monde, la nuit passée dans la voiture, la nuit passée a chercher un place, ma crise de nerf à propro de l'ex numéro 2, le trajet du retour avec Reno et Poopook, l'anniversaire de Reno, mon texto à minuit pile "ouai t'es la première !", mon sourire.

Il y a eu la petite soirée d'anniversaire, le bar, les musiciens, les bières que j'ai payé (un peu trop cher), les mots écrits sur Reno, le contrebassiste à qui j'ai donné mon numéro à force de beaucoup de bière, "mais je suis de gauche moi, reste avec moi", les hurlements dans la rue, mes trous de mémoire, et comment j'ai réussi à rentrer chez moi en Noctilien à 3h du mat, miraculeusement.

M comme Mini-maison

On a fait rentré toute ma piaule dans la Honda Civic.
Ca m'a un peu fait bizarre, de savoir que j'avais rien.
Malgrès le synthé, le miroir et le micro-onde, tout rentrait quand-même.

Arriver chez Lio, c'est comme si je n'avais rien ramené.
3 fringues dans un placard, des livres dans un coin, et le micro-onde.

Mais il était tout fou, à me faire des "petits coins pour moi" un peu partout, à ranger mes affaires soignement, à coller mes posters sur les murs.

"J'veux que tu te sentes chez toi".

Il avait vraiment l'air heureux.
Ca m'a rendu heureuse.

Passer autant de temps avec lui ne me fait pas peur.
Au contraire, ça me rassure.
Savoir qu'il sera toujours là pour m'encercler avec ses bras.

Et je l'aime, encore plus qu'au début, même si il est de droite.

N comme Nouvelle amie

N'en pouvant plus, on est allé dans une animalerie.
En belgique.
Un dimanche.
Avec Ryne.

Là bas, les rats sont à 1.95€.
C'est qu'ils ont le soucis du centime.

J'ai flashé sur une petite rate grise, noir et blanche.
Ryne a pris un raton couleur crème.

Un raton hystérique.
La mienne est resté sagement dans mes mains et dans mes cheveux.
"J'crois qu'elle est enceinte, t'as vu son bidon ?"

On a ramené nos rats dans un bar, le temps d'une bière à 1.50€.
J'étais heureuse, malgrès le fait qu'elle ne sera jamais comme Lundi, elle est super bonne ma ratoune.
J'y f'rais gaffe, promis.

Oui mais ... Comment j'vais l'appeler ?

O comme Oh mon dieu

Premier jour de cours.

Bilan.

- 2 cours manqués (je n'avais pas mon emploi du temps, et puis on perd pas les bonnes habitudes)

- 1h30 pour trouver la salle 06.033 (moi qui rêvait d'aventure, je suis pas déçue)

- Premier cours avec une folle dingue qui-ne-sait-pas-où-se-trouve-le-bouton-pour-faire-marcher-le-micro-mais-c'est-pas-grave on fait cours quand-même.
Ses remarques déplacées sur la bible "Des siècles de misogynie à cause de ce bouquin, voyez !!"
Son air complètement à l'ouest.
J'adore.

- Et puis le midi, devoir choisir entre manger ou chercher sa salle (pour ensuite avoir le ventre qui gargouille super fort pendant le cours sur Balzac, trop la classe).

- Des noms de cours bizarres comme "Margie et illusion"
Euh, j'ai demandé à faire une fac de Lettres, pas l'école du cirque.

A part ça, la fac, c'est trop super cool.
Super cool parce que je suis en weekend le jeudi soir.
Et parce que je peux faire 5 grâce-mat dans la semaine.

Héhé, que de demandez de plus ?

(Ouai, chez moi l'alphabet ça s'arrête à la lettre "O".)
(Et je vous emmerde.)