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Les mots sans le son


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Non, je parle de l'écriture personnelle, de ce mouvement qui va de l'intérieur vers l'extérieur pour exprimer ce qui s'est imprimé en soi - écrire pour dire son expérience, ses rêves, écrire pour dire son désir, l'attraper dans le filet des mots comme un poisson gigotant.
Celle que vous croyez, de Camille Laurens
Sad memories
On n'écrit pas sur commande.
Ca vient tout seul, comme ça, des mots qui demandent à sortir.
Il n'y a plus qu'à obéir.

***

Ils sont en train de parler tour à tour de la séparation de leurs parents. Une lettre sur la table du séjour, un vide, de la tristesse, le parent qui reste seul, le jour qui marqua leur vie pour toujours.
Je les écoute, j'essaye d'imaginer, je suis absente de moi-même.
Mimie se tourne vers moi après un silence :
"Et toi, tu te souviens du jour où ils se sont séparés, tes parents ?"
Sursaut mental, j'atterris, les couleurs changent soudain dans ma tête. Oui bien sûr que je me souviens. J'ouvre la bouche.
"Oh moi le jour où ma mère est partie, c'était merveilleux ! Waaaah ! Le pieeeeeeeeeeed ! C'était caaaaaaaalme ! Pu de cris ! Pu de portes qui claquent ! pu d'assiettes volantes ! La paix retrouvée, le silence ...!"
Ils me regardent avec des sourires tristes. Je sens bien que je suis pathétique à essayer d'être drôle. Mes yeux brillent et mon moral plongent vers les ténèbres. L'alcool aidant. Je me ressers un verre pour tenter de disparaitre complètement.

Oui je m'en souviens du jour où elle est partie. J'avais 5 ans. Elle claquait les portes au rythme de ses aléas dans la maison. Quelques hurlements pour relever un peu l'atmosphère. Elle devait avoir fini de tout jeter dans la voiture, il ne lui manquait plus qu'une valise : moi. Elle m'a pris par le bras pour m'amener vers la voiture. Je n'ai pas du réfléchir très longtemps à ce moment là : une mère hystérique qui veut vous emmener on ne sait où, non non. Je me suis accrochée au mur en pleurant, puis à mon père qui avait du se rapprocher. "Papa !" Il  n'a pas beaucoup bougé, trop passif, trop sous l'choc j'imagine. Elle m'a tiré violemment, par le bras, par la taille. Je m'accrochais comme une sangsue aux jambes de ce père statique en criant "NON". Elle a fini par céder, en hurlant qu'elle allait revenir me chercher, que ça n'allait pas se passer comme ça. Elle a attrapé mon frère et elle a claqué la porte. J'ai entendu la voiture démarrer en crissant. J'ai eu une dernière frayeur quand je l'ai entendu revenir, mais heureusement, ça n'était pas pour moi : elle avait oublié son paquet de cigarettes.

What is life?
Life is like a big obstacle
put in front of your optical to slow you down
And everytime you think you gotten past it
it's gonna come back around and tackle you to the damn ground

(1)

Je suis allongée sur le dos, des écouteurs dans les oreilles. Les basses de la musique rap qui résonnent contre mes tympans, enveloppant mes pensées tristes. Parce qu'on oublie pas les sons qui nous ont bercé, adolescent, les sons écoutés dans le noir qui nous ont tenu compagnie. J'ai aimé Eminem sans trop savoir pourquoi, et pourtant c'est assez simple à comprendre. Sa haine pour sa mère, sa colère contre ce qui m'est familier. Je suis allongée sur le dos et je n'arrive pas à m'endormir, ça fait 4h maintenant, et la nuit qui va bientôt partir. Je vais finir par croire qu'elle non plus ne voulait pas de moi.

Je revois mon père sur cette terrasse, nous deux, on discute pour ne pas s'engueuler, c'était il y a une semaine. J'avais bu, oh pas beaucoup, juste assez pour ne pas me retenir.
"Papa, pourquoi tu m'as abandonné ? Tu ne t'es pas occupé de moi quand elle est partie, tu m'as laissé, ils se sont occupé de moi à ta place !"
Il faudrait trouver les mots, étiqueter cette douleur, être au clair. Après tout, ça n'est pas si grave. Mais je ne trouve pas les mots.
Il déviait sans cesse. Ne parlait que de lui. Son enfance, ses parents.
"Et moi ? Est-ce que j'ai le droit de souffrir moi aussi ? Est-ce que j'ai le droit d'exister ?"
"Tu sais j'étais pas préparé, elle m'a pas demandé ta mère, j'ai été obligé, t'es arrivée, elle m'en avait pas parlé, j'étais faible".
Il prenait cette voix d'homme qui souffre. D'habitude ça m'aurait attendri, pauvre papa, t'as vraiment pas d'chance, elle t'en a fait voir maman ...
"T'étais faible ? ET ALORS ?? C'est une raison assez forte pour ne pas t'occuper de moi ? Pour la laisser me reprendre, alors que tu savais qu'elle était folle ?"
Tout s'éclairait, et pourtant, il faisait de plus en plus noir. Des larmes roulaient sur mes joues, et je savais très bien qu'il ne me consolerait pas. Il allait falloir que je ravale tout ça et que j'inspire. Est-ce qu'il se rendait compte de ce qu'il me disait ? Est-ce que j'exagère ?
"Mais j'ai quand même fait des trucs pour toi !"
"Comme quoi ?"
"... Je t'ai emmené à l'école, quand t'étais au collège, tu te souviens !"
"Papa, l'école est obligatoire jusqu'à 16 ans, c'est NORMAL de m'y emmener ..."
"Oui mais c'était loin !"
"C'était loin parce qu'on avait pu de logement et qu'on a du vivre chez tes parents, parce que t'as pas été capable de trouver autre chose, tu pensais que c'était pas possible ... C'est grâce à ta copine que tu as trouvé un appart pour nous, trop petit ... Et c'est elle qui t'a motivé pour que tu me récupères, sinon tu m'aurais laissé avec maman..."
Je n'sais plus bien tout ce que j'ai dit d'autre ce soir là. Il est arrivée un moment où je n'avais plus de force pour parler. J'aurais voulu qu'il me contredise. Mais ça ne fonctionnait pas.
J'suis allée marcher un peu, fumer une cigarette, appeler une amie, regarder les étoiles. Respirer.

I don't know why this world keep turning
Round and Round
But I wish it would stop, and let me off right now

(2)

On s'est garé dans une station service près de Venise. Sièges inclinés totalement, mes yeux se fermaient déjà. Mimie me parlait du passé, de l'amour, de ses ex, de nous. J'essayais de ne pas lui faire faux bond, et puis j'aime bien l'écouter. Elle dit "c'est marrant, tu as changé, au lycée tu avais un regard triste ... Tu n'es pas d'accord ?"
Un regard triste ?
"Mais j'ETAIS triste, c'était pas seulement mes yeux, je crois ... j'ai commencé à être heureuse récemment ... mais avant il y a eu l'enfance -triste- et puis l'adolescence -horrible- et enfin, un peu de bonheur. Pour rien au monde je ne reviendrais dans le passé !"
Moi qui avais sommeil, j'ai parlé d'une traite. Mes propos sont durs, elle se tait. Dans le noir je ne vois pas son visage. Je change de sujet.

La nuit chez elle je faisais des cauchemars. Celui-là par exemple : Je marchais dans un long couloir sombre très étroit. Une guillotine me tombe sur la tête, me fend le crâne jusqu'aux oreilles. Du sang coule sur mon front, dans mon cou, je n'ose rien faire. Ma mère passe à ce moment là. Elle ne s'arrête pas, elle ne me regarde pas, elle dit "ça va ?" je réponds "oui". Le couloir est tellement étroit qu'elle me frôle, puis s'éloigne comme elle est arrivée. Ce rêve, je ne m'en suis jamais vraiment remise. Elle ne me voyait pas. Elle ne se souciait pas.

Baby, don't cry honey, don't get the wrong idea
Mama's too sweepy to hear you screamin in her ear (ma-maa!)
That's why you can't get her to wake, but don't worry

(3)

Je suis assise sur des rochers au bord de l'eau, une pizza, une bouteille de vin, et le marseillais qui fume des cigarettes avec moi. Il fait nuit. Il dit "tu sembles libre, complètement libre, on dirait que tu fais uniquement ce que tu as envie de faire, sans contrainte".
Il n'est pas le premier à me dire ça. Ce mec est prof. Il a eu l'agreg. 29 ans. Rien que pour ça j'aurais voulu lui répondre que non, je n'étais pas vraiment libre, parce que je suis tombée amoureuse d'un prof, et que c'est sûrement pour cette raison que je t'ai laissé m'embrasser. Mais ça serait trop long à expliquer. Et puis ça m'appartient. Peut-être que ça n'a rien à voir. Tu n'es pas lui.
J'ai souffert pendant 2 mois de son absence. Fuir Paris, fuir la fac, ne plus faire d'effort intellectuel, arrêter d'écrire, ne pas rester seule. Les conditions pour cesser d'avoir mal.
Je voudrais bien réussir à être en couple à nouveau. Vraiment, je le voudrais. Qu'on me fasse des massages, qu'on m'embrasse, qu'on m'appelle pour savoir si je vais bien. Mais je n'y arrive plus. Ca y est, ça fait 2 ans. Alors non, je ne suis pas libre, je suis cernée par mes peurs. Et je patine dans le vide, comme toi.

Le soir, j'avais 6 ans, ma grand-mère me lisait des histoires avant de dormir. Quand j'ai appris à lire, c'est moi qui lui faisait la lecture, "comme une grande". Je ne comprenais pas la moitié de ce que je racontais, mais je lisais bien, j'étais bonne élève, obéissante. Mais ce que j'aimais le plus, c'était réciter par coeur, faire semblant de lire. J'ai toujours eu une bonne mémoire auditive. A force d'écouter les mêmes histoires, ça s'imprégnait. Quand ma mère m'a repris, il n'y a plus eu d'histoire. Le carrelage était froid, j'éteignais la lumière et je sautais le plus vite possible dans mon lit, à cause du loup. Elle me disait "C'est fini les habitudes de bébés ! J'vais te faire grandir moi, tu vas voir !". Ca oui tu m'as fait grandir maman. Mais tu aurais du attendre que je ne sois plus une enfant.

Un jour j'arrêterai de ressasser le passé.
Un jour j'arrêterai d'avoir cette sensation de vide en moi.
De folie aussi.
Un jour je pourrais écrire sans craindre mes propres mots.
Les mettre sur la page et tourner enfin.

Pour toujours ?


(1) If i had, Eminem
(2) As the world turns, Eminem
(3) 97 Bonnie and Clyde, Eminem



***

One hand, it loves the other
So much on me...

Bb   C        A    Bb
Born stubborn me
Bb   C   A        Bb
Will al- ways be
Bb                 C   A         Bb
Before you count a-one-two-three
Bb             C           A
I will grow my own private branch
Bb      C     A
Of this tree

Bb                      C
I never thought I would compromise

C     Gm      C
Let's unite tonight
C  Gm        C
We shouldn't fight
C    Gm        C
Em___brace you tight
C      Gm     C
Let's unite tonight ...


(Unison, Björk)

Ecrit par Aphone
le Mardi 31 Août 2010
à 01:30



Commentaires :

  disturb
01-09-10
à 20:51

Tu sais ma caille, s'il y a bien quelque chose dont je te félicite, c'est d'avoir dit à ton père un peu de ce mal qu'il t'a fait, même si les mots justes n'ont pas été crachés.
Moi, j'ai laissé pourrir, et je n'ai pas eu le temps de lui balancer mon venin à la gueule. Aujourd'hui je regrette, et le deuil en est d'autant plus dur.

Franchement, t'es un sacré petit bout d'femme.
Et tu sais quoi, je suis certaine que tu parviendras à retourner dans une relation, parce que ça t'aidera à surpasser tes angoisses.
Tu sais vivre seule, et c'est quelque chose que peu de personnes savent faire.
Quand tu trouveras la personne qui te conviendra, et tu la trouveras c'est certain, tu ne te poseras même pas de question, ça viendra tout seul.
C'est facile pour moi de le dire, mais il arrive des choses bien, et mon chaton, je t'assure que ça t'arrivera.

Je pense à toi !
Et je veux un mojito !!

Des bisous

  Anonyme
02-09-10
à 16:37

Re:

je suis d'accord avec disturb, il est important de dire tout ce que l'on a sur le coeur (surtout avant qu'il ne soit trop tard) mais il faut que tu apprennes également à pardonner, moralement, que tu éjectes cette haine que tu traines avec toi depuis toute petite, elle te ronge et t'enfermes dans cette prison remplie de peur...

Ce qui est au passé doit rester au passé.

 


  aphone
02-09-10
à 20:13

Re:

J'ai lu que le pardon n'était pas indispensable. Ca dépend des cas. Pardonner, c'est un peu comme dire "ça n'est pas si grave ce que tu m'as fait". Alors que non. Et quand il y a plus de mal que de bien, pourquoi pardonner ? Est-ce qu'on pardonne quand on se fait agresser dans la rue par un inconnu ?
Et puis, pour pardonner, il faudrait qu'il y ait eu des excuses de faites, or là, personne ne cherche à se faire pardonner. Comme si ça n'avait jamais eu lieu. Je patine pour être écoutée et comprise !
Je suis loin d'être prête à pardonner.  Je commence à peine à libérer ma colère et à me sentir mieux !
=)
Merci Anonyme

  aphone
02-09-10
à 20:03

Re:

DISTURB :

Merci beaucoup pour tes mots ! Ca touche ça touche !

Oui c'est dommage pour ton père. Tu crois qu'il t'aurait entendu ? Personnellement je sais que je ne parlerai jamais à ma mère car ça ne sert à rien, elle n'entend pas. Alors pas de regret, juste de la colère qui ne sait pas trop où aller ! Dis-toi que peut-être, ton père n'aurait pas compris tes reproches, et qu'il n'aurait pas chercher à se faire pardonner, et que finalement, ça aurait été pareil. Je sais pas si ça marche, c'est une solution que je propose, à essayer =)

VIVEMENT LE MOJITO !!!
Plein de bisouuuuuuuuuuuuuus !

  disturb
05-09-10
à 15:42

Re:

Mmh tu sais, je crois pas vraiment que mon père m'aurait entendu.
Je pense qu'il était lâche, et qu'à ce titre, il aurait fuit la discussion, ou aurait été évasif, en s'en foutant royalement du mal que ça aurait pu me faire.

Ah l'égoïsme mdr !

Et oui, je te confirme, vivement le mojitoooooooooo !

  Mamzelle
03-09-10
à 00:22

Tu n'es pas folle.
Et un jour, ça s'arretera.
Tout doucement, tu verras.
Mais ça s'arrêtera.


Fais toi confiance Aphone,
tu as du bon en toi,
et même si tu ne le veux pas,
ça s'arrêtera.


"Alors non, je ne suis pas libre, je suis cernée par mes peurs. Et je patine dans le vide": Ca me fait penser à moi. Il y a deux jours, une copine est venue me voir en me disant "Alors, toujours seule?!"
J'en ai détruit sur place les madelaines que je venais de faire, et je suis partie courir.
Oui toujours seule, et toujours comprimée par mes propres peurs. Toujours.

  aphone
03-09-10
à 02:30

Re:

T'as pas rajouté un petit "merci de me le rappeler !" avant de partir courir ? =)
J'ai un pote, chaque fois qu'il me voit il me dit "alors Aphone, est-ce que ta mère est toujours aussi folle ? Et tes petits frères, ils vont bien ?" Grrrrrrrrr
Alors la dernière fois j'me suis énervée ^^
"TU VOUDRAIS PAS M'PARLER D'AUTRE CHOSE ??"
Lol
T'as raison en tout cas, tout doucement ça s'améliore.
J'suis pas pessimiste.
Plutôt optimiste.
Mais j'passe par des grands moments de colère à cause de la thérapie, et c'est fatigant !
Sinon j'ai des tonnes de trucs rigolos à raconter
Mais j'profite de mes derniers jours de vacances !
Ca doit être chouette de courir avec toi



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