Hier c'était l'anniversaire de ma mère.
42 ans.

Je me suis dit que si je ne lui fêtais pas, c'était vraiment pas cool.
Mais je bouillonne encore trop en pensant à elle.
Je lui ai écrit 2-3 trucs qui me traînaient sur le coeur, ponctué d'un "joyeux anniversaire".
C'était pas spécialement méchant, d'ailleurs elle l'a pas mal pris.

Elle m'a envoyé 10 textos réponses.
A croire qu'elle peut pas se contenter de répondre qu'une seule fois.
Ca me rend chèvre ça aussi.

Elle a m'a dit tellement de conneries, je savais pu par où répondre.
J'ai pas répondu.

J'étais dans le bus qui mène chez Ryne pour essayer de réparer ma mobylette, qui ENCORE UNE FOIS, ne veut plus démarrer.
Ca aussi ça me rend chèvre.

J'ai mis plus d'une heure pour arriver chez elle, j'ai mis de l'huile, et comme je pouvais rien faire d'autre qui soit de mon niveau, j'ai téléphoné à mon père.
Les hommes qui touchent à la mécanique, ils te donnent des conseils comme si toi aussi t'avais fait ça toute ta vie.
- Mais c'est facile, t'as juste qu'à enlever le cash de la bougie, tu prends un fils de fer, tu le passes dedans, pi si c'est pas ça c'est peut-être le moteur, dans ce cas là tu la démontes et ...

Hum.
J'ai tripoté vaguement la bougie et puis j'ai pris le bus en sens inverse pour rentrer chez moi.
Ma mère continuait de m'envoyer des textos-bétises, comme un refrain à ma galère.

J'ai pris le bus, le métro, j'ai marché jusqu'à la baraque et là, à 10 mètres de la porte, flash-back :
"Aphone, t'as oublié les clefs sur la mob".

J'ai appelé Ryne.
Elle pouvait rien faire pour moi.

J'ai appelé le Neveu.
Ca sentait que je le saoulais à 3km.
Je lui demandais simplement le numéro du locataire pour qu'il m'ouvre si il est là.
La lumière était éteinte, j'étais pas optimiste.

Il me lâche le numéro, mais j'avais rien pour le noter sur le coup, il est pressé de raccrocher.
C*nn*rd.

J'ai essayé de noter le num sur mon portable en téléphonant, mais en raccrochant ça s'est effacé.
J'ai envoyé un texto auquel il a jamais répondu.

Je finis par appeler mon mec, qui travaille, tout en donnant des coups de poings de la porte, au rythme des tonalités.
Il me dit qu'il va téléphoner au locataire.

Il rappelle.
Le locataire n'est pas là.
Il peut rien faire pour moi.

Il faut que j'aille chez sa mère pour récupérer une clef.

Je raccroche.
Je me mets à pleurer.
Je me sens terriblement pas aidée ici.

Il fait nuit, j'ai une peur monstrueuse de marcher la nuit, depuis le viol d'une pote à moi.
Je me retourne toutes les 2 secondes.
J'entends un mec courir derrière moi, je fais un bond.
Mon coeur aussi.
J'en tremble presque, j'essaye de me contrôler mais je suis tétanisée.

Je sanglote en marchant.
J'arrive chez la mère avec mes yeux un peu rouges.
Elle dit rien.
Elle se contente de me parler un peu mécanique, croyant refaire démarrer ma mob à distance peut-être, me répétant que c'est sûrement la bougie.

Moi je me promets que la prochaine fois que Ryne aura besoin de moi, je l'appellerai, au lieu d'aller faire de la mob sous la pluie à 9h du soir.
Je me trouve conne.

La mère ne propose pas de me raccompagner, malgré ma peur.
Je rentre.

Mon portable n'a plus de batterie.
Je ne le recharge pas.
J'envoie tout le monde balader.
Tout ces gens qui ne sont pas là pour venir m'aider quand j'ai des problèmes.

J'allume la télé.
Ca va pas.
Je regarde La Nouvelle Star.
Ca va vraiment pas.

Je me fais des oeufs à la coque, des patates au four.
C'est vachement bon.

4h que je suis sortie de cours, et 4h que je galère pour cette conne de mobylette, qui me pique mes clefs en plus.
Il est 21h.
Je suis une loque, je laisse le sommeil me gagner rapidement.

Ce matin, Lio et moi, on s'est engueulé.
Pour des problèmes d'argent.
Passons.

J'allume mon portable.
Je reçois encore 3 textos de ma mère.
Elle avait pas du finir sa phrase.

Et là, c'est la cerise sur le bigmac.
Elle m'annonce qu'elle est enceinte, d'un 5ème gosse, et qu'elle compte le garder.
Qu'elle espère avoir une fille.
Elle s'est mis dans la tête qu'on remplaçait un enfant parti par une grossesse.

Le monde est absurde.
Ma vie est absurde.
Mes parents sont absurdes.

Et moi je suis là, dans un bled paumé, sans mobylette, il fait 6°, mon boyfriend qui me dit que je suis conne et Gainsbourg qui me fait des propositions douteuses en fond sonore.

Il est vraiment temps que j'appelle ma grand-mère.